S’il y a une raison pour laquelle le premier album de Speech Debelle s’appelle « Speech Therapy », c’est parce qu’elle parle directement avec son coeur, en totale intimité, comme si elle s’adressait à une personne en particulier. Comme si elle espérait que ce disque ne soit jamais découvert. En quelque sorte, ce n’est peut-être pas si étonnant. Cette jeune sud-londonienne de 25 ans en a bavé avant et depuis qu’elle a commencé à travailler sur ses morceaux. La chanson la plus ancienne ici s’appelle “Finish This Album”. C’est la chanson qu’elle a interprétée en premier lorsqu’elle est venue se présenter chez Big Dada il y a presque cinq ans. Le thème : parvenir à accoucher de cet album comme si cela allait la libérer de tous les problèmes de la vie. C’est à la fois intimiste et grandiose, très personnel et très politique, aussi terre à terre que spirituel. Cet album est un voyage à travers Londres et à travers la vie de Debelle. Speech est jeune, mais déjà très mure. Sa voix fragile la fait passer pour une ado, mais ses lyrics sont la preuve d’une grande expérience.
Finalement, tous les éléments ont été réunis et l’album est là : “Speech Therapy” est comme elle le voulait, depuis le début. Elle a toujours su ce qu’elle recherchait, mais il lui a fallut beaucoup de temps pour trouver les moyens de faire ce qu’elle entendait dans sa tête. Speech n’a pas besoin de crier pour faire passer son message, ce qui fait que ce disque ne sonne comme aucun autre album de hip-hop.
C’est chez Big Dada que Speech a un jour rencontré Wayne Lotek, qui a produit en plus de son projet Lotek Hi-Fi le “Brand New Second Hand” de Roots Manuva. Wayne qui vit en Australie avec sa copine était dans les parages pour visiter sa famille. Le résultat de cette heureuse rencontre c’est “Searching” : la guitare acoustique jouée par le frangin de Wayne, la batterie brossée syncopant sa voix, l’atmosphère parfaite pour les réexions de Speech sur sa jeunesse et son eervescence.
La suite est claire. En novembre 2007, Speech s’envole pour l’Australie où, avec une équipe de musiciens que Wayne connaît bien et le producteur Plutonic Lab (responsable de la fanfare de clarinettes du single “The Key” et du drame extra large de “Better Days”), elle livre ce qui va devenir “Speech Therapy”. Elle prote de l’opportunité pour sortir un maximum d’émotions, pour s’attarder un peu sur ses souvenirs et ses peurs, sur les petits accidents marrants et les observations acerbes. “Daddy’s Little Girl” est une attaque cinglante de l’absence de son père portée par un orgue et
des basses dub. “Working Weak” est une fable drôle sur la vie dans les bureaux de Londres. “Wheels In Motion” est un regard sociologique sur Londres et au delà et “Buddy Love” se penche avec humour sur ce qu’il advient lorsque l’on commence à coucher avec son colloc. La combinaison de détails microscopiques et de panoramas, de vannes marantes et de vrais observations fait que la vision du monde de Speech est si convaincante.
De retour à Londres, alors que Lotek travaillait sur la nalisation et le mixage des sessions, Speech a continué ses rencontres. Roots Manuva a tout de suite accepté d’écrire et de chanter de magniques et mélancoliques choeurs sur “Wheels In Motion” ; Micachu s’illustre sur “Better Days”. Mike Lindsay de Tunng avait écouté certaines démos et voulait absolument participer : le résultat est plutôt réussi avec l’avant-pop ensoleillé de “Spinnin” et le nostalgique “Live & Learn”. Et enn Dread Keys, vieil ami de Speech et guitariste qui l’accompagne souvent, magnie par son jeu les
paroles tout en rupture de “Go Then, Bye,” où Speech, comme les meilleures divas soul, brille mi-blessée mi-déante : “So take your X-Box and go ‘long”
Mais c’est bien le dernier morceaux de l’album, « Speech Therapy », qui résume le mieux pourquoi Speech est si douée et pourquoi les réactions à sa musique ont été aussi fortes et sincères : “I’ve made some mistakes in this life I’m not proud of, see?/ But I hope that doesn’t mean now I’m trying it will be harder for me/ I’ve been hurt and it’s not an excuse but it’s a reason/ It’s like some things happen in life for a lifetime or a season/ And I’m just now learning how this world really works/ It’s a law that says you get back what you put forth.”
Speech Debelle a tout donné : ses doutes, ses croyances, ses erreurs, son amour, ses angoisses et son humour. Maintenant, à vous de jouer ! La presse anglo-saxone est unanime : « The Key » a été élu single de la semaine par le Sunday Times, le NME, DJ et Update, et single de l’année pour Plan B ! Speech Debelle est par ailleurs acclamée par Time Out, Music Week, The Guardian, Pitchfork, Dazed & Confused, Stool Pigeon, …