Malgré l’incroyable créativité du hip hop, sa capacité à générer de nouveaux styles et à se réinventer, ce n’est pas tous les jours que quelque chose de frais et d’original se présente à nos tympans. Accueillons donc comme il se doit “YoYoYoYoYo”, le premier album de Spank Rock. S’inspirant du son de leur ville de Baltimore natale, Spank Rock construit un univers inédit, loin de tous les disques déjà entendus. D’accord, il y a les précurseurs – le premier Missy, 2Live Crew, les Beastie Boys et Dizzie Rascal nous traversent l’esprit – mais “YoYoYoYoYo” exige lui aussi une approche qui lui est propre.
Il s’ouvre sur le hit white label “Backyard Betty” (l’histoire d’une “championne du tremblement de fesses”). Le producteur XXXchange y entame un massage vivifiant des oreilles à l’aide de basses efficaces, d’un beat composé de percussions poubelles et d’une mélodie légère, sinueuse mais éloquente qui semble tout droit sortie d’une calculette. Naeem Juwan aka MC Spank Rock s’y installe et aligne l’histoire rigolote de Betty et de ses nombreux soupirants d’une voix nasale séduisante et traînante qui tient la comparaison avec Q-Tip (avec rimes plus coquines). Et ce n’est que le début…
“What It Look Like” se développe autour de pincements de violons et de lyrics assurés (“My tongue is a drum / My mind’s a machine”). Morceau le plus expérimental de l’album, ”IMC” accélère la foulée et aiguise les mots qui sillonnent une programmation rythmique. Sonnant comme Mo Tucker jouant des bloco beats sur des timbales à l’échelle montagne, il s’achève sur le cri de guerre “Your sound is dead”.
“Rick Rubin“, est un hômmage qui s’inspire du zenmeister barbu aboutissant à un track robot-latino salace et envoûtant. “Touch me“ est un abstract caverneux à la rime érotique, “Bump” de la booty 80 de fraternité étudiante reconfigurée en une épopée No Wave stomper (sur laquelle apparaît à pleine bouche Amanda Blank, la rapstress de Philadelphie).
“Sweet Talk“ brille comme un funk essentiel et sale à souhait, plus entendu depuis la période classique de James Brown. Il trouve sa résolution dans les douceurs d’une soul lo-fi : un moment musical à couper le souffle, brutal et magnifique avec les Typical Girls aux chœurs.
“Chilly Will“ se construit doucement pour devenir un pure cut-up de club aussi subtil et fascinant que décalé, un thème repris à un autre niveau sur “Top Billin’ From Far Left”. “Coke & Wet” ralentit l’excursion et chausse un beat hip-hop plus traditionnel sur lequel MC Spank Rock montre une fois encore qu’il joue dans la cour des grands, maniant collège et gangsta avec aisance.
“Competition“ guide l’album vers sa fin sur une note plus sombre, un combat rap pour le pouvoir immédiat sur fond de piqués de violoncelle, de pulsations électroniques et de bouts de guitare désincarnée à contre-temps : MC Spank Rock le décrit comme “un chant de guerre triomphant“.
“Screwville USA“ fait office d’outro étendue, où le ténor de Juwan mue en baryton, les cordes et les flûtes offrant une dernière chance de reprendre son souffle pour mieux absorber le voyage sonore effectué.
En 42 minutes, Spank Rock réussit à dessiner le paysage musical qui l’entoure avec humour, charme, clairvoyance, vaillance et avant tout créativité. Le genre de premier album dont on parle et qu’on aime pendant de longues années. Goûtez-y vite…
« Spank Rock accompagné de son crew se présente comme la révélation de ce début d’année » Trax
« Ecouter Spank Rock, c’est découvrir un univers inédit et loin de tout ce qui se fait actuellement » Open Mag
« Le maillon fort entre Aphex Twin et Pharrell Williams. » Les Inrockuptibles