Love Trio in Dub featuring U-Roy est à la fois un retour aux sources du reggae et du dub et une fenêtre sur le futur. U-Roy continue l’édification de son statut de légende et de pilier du reggae. Accompagné des garçons downtowntronica de Nublu, Love Trio, il se présente comme jamais auparavant. C’est sûr, ce disque est tout aussi bien destiné aux collectionneurs de dub et de reggae ancien qu’aux fans de Thievery Corporation ou d’Herbert. Sans compter la fraîcheur qu’apportent ces précieuses invitées, au chant, Sabina Sciubba et Marla Turner (respectivement des Brazilian Girls et de Wax Poetic) à ce mélange de dub et d’electronica. Passez-vous le morceau Lovers Rock ne serait-ce qu’une minute et vous aurez la sensation d’écouter un grand 45 tour des années 70… avant de réaliser que nous sommes bien en 2006. La bonne nouvelle c’est aussi que ces musiciens jouent réellement live. Ilhan Ersahin, Jesse Murphy et Kenny Wollesen ont déjà joué au Brésil, à Istanbul et New-York pendant que Love Trio a accompagné Tom Wait, Bill Frisell, Eddie Henderson, Erik Truffaz, John Zorn… Ilhan est l’homme derrière Wax Poetic et Jesse le bassiste des Brazilian Girls.
Avec comme volonté, comme engagement même, de proposer des sons différents et la fusion des divers genres de la musique pop, Nublu Records annonce en 2006 la sortie de Love Trio in Dub feat. U-Roy. Love Trio est rejoint par Ewart Beckford, le grand dubmaster jamaïquain bien connu dans le monde entier sous le pseudo de U-Ro. y Père du style DJ moderne, c’est bel et bien U-Roy qui a constaté qu’en supprimant les vocaux et en remixant les pistes d’enregistrements, au studio de Duke Reid où il était alors disc-cutter, qu’il pouvait créer de nouveaux sons à partir d’extraits de rocksteady, annonçant ce que l’ingé son Teo Macero de Colombia fera bien plus tard avec les enregistrements du grand Miles Davis.
Cette compilation, qui contenait un morceau de la légende du dub et qui constitua le premier achat d’Ilhan Ersahin, alors âgé de 13 ans et vivant en Suède, le transforma profondément, lui faisant apparaître que la musique serait au centre de sa vie. Ne manquaient plus qu’un saxophone tenor et un billet pour Gotham et son destin était scellé. Neuf ans d’apprentissage à New York et des ateliers hebdomadaires au Sweet Basil, au contact d’exceptionnels personnages du monde du jazz. Ces neuf années allaient l’amener dans le Lower East Side et Nublu: le génie était désormais hors de la bouteille. De cette longue gestation, Love Trio est né.
Parmi ceux qui ont fait le voyage vers l’est avec Ersahin, le bassiste Jesse Murphy, jeune Californien qui deviendra le bassiste des Brazilian Girls, et le batteur de Tom Wait, Kenny Wollesen. La musique que le trio cherchait à faire devait défier tout concept de genre ; elle serait, car Ersahin l’exigeait, sa musique : « Il y a cette ville – cette ville où nous vivons. Je vis ici, et sur la route, et il y a la vie nocturne mélangée à la vie de studio ; c’est de l’electronic et du DJ donc. Car dans la culture d’aujourd’hui, c’est vraiment inévitable. J’essaie juste de vivre dans l’instant, d’être de mon époque ».
Ajoutez au trio une section de cuivre, la tromboniste Jeanne Geiger, le trompettiste John Gibson et le saxophoniste Adam Beach ainsi que le tenor de Ilhan Ersahin soutenu par des claviers aux ponctuations soutenues. Track one, Rock the Rhythm au chorus plus que dub de Sabina Sciubba qui flotte au dessus et autour du dubmaster, dans une brume pleine de sérénité. Guidé par les pulsations de bass de Murphy et les cimbales de Wollesen, c’est le parfait héritage du dub. Sans oublier, sur Algo Mas, le melodica de Didi Gutman, et sur les autres morceaux les guitares de Thor Madsen et Charles Stella, la voie de Sameera Reddy…