Imprévisible chat sauvage depuis toujours, le bassiste/compositeur/chanteur Stephen Bruner, alias Thundercat, ne peut être dompté artistiquement. Véritable maître dans son domaine, on peut le voir jouer de la basse avec Flying Lotus, Erykah Badu et Suicidal Tendencies, mais aussi rejoindre sur scène les Stanley Clarke, Snoop Dogg et autres Red Hot Chili Peppers. En 2011, son premier album (The Golden Age of Apocalypse, co-produit par Flying Lotus) avait créé un mélange des genres énigmatique d’indie rock et de jazz, agrémenté d’un soupçon d’electronica.
Un album sur la perte et la reconstruction, essayer de regagner quelque chose, et capturer ce moment de clarté où nos pieds retrouvent le plancher. L’album, en emmenant une fusion de pop, de soul, d’electronica, de prog rock et de funk dans une dimension encore inexplorée, creuse et descend vers le cœur de ce qu’il faut pour saisir la paix, quand celle-ci semble si lointaine.
Dès l’entrée grondante et profonde de « Tenfold », chacune des douze pistes fusionne avec la basse caractéristique de Thundercat, ses riffs et ses lignes de basse planant haut dans les cieux pour y rencontrer la touche astrale de FlyLo. La voix et les harmonies de Bruner s’envolent elles aussi avec honnêteté, et s’élèvent au dessus du chagrin d’amour à l’aide de réconfortantes odes à l’amour et à la camaraderie (« Tron Song »), et de mantras pleins de sagesse (« Special Stage »). L’album est à la fois une comédie et une tragédie, il sert délicatement des morceaux tels que « We’ll Die » tout en faisant ressortir le funk cosmique de l’hymne en devenir « Oh Sheit, it’s X ».
Aussi lourd que le poids des paroles puisse être, la divine musicalité de Flying Lotus et les collaborations musicales de Thundercat y apportent de la lumière. L’album, qui navigue parmi des rythmes denses et des progressions harmoniques intenses, traverse les rives hypnotiques de « The Life Aquatic », les explorations analogiques de « Lotus & The Jondy » (enregistré dans le studio d’Adrian Younge avec Thomas Pridgen à la batterie), et le bœuf prog rock de Thundercat et Lotus « Seven », une impro spontanée qui s’est matérialisée de façon organique en moins d’une heure. Pas étonnant que la paire fasse souvent référence à leurs sessions libres comme le fait d’ « aller dans l’espace ». Ils poussent chaque piste dans ses retranchements et emmènent l’auditeur vers un lieu totalement différent : quelque part au-delà du temps, un lieu qui transcende ce royaume. Et comme le demande la piste susmentionnée « Seven » (son nom est dû à sa signature rythmique ambitieuse) : « Entendez-vous les sons de l’infini ? »