Si la musique était physiquement capable d’habiter l’espace et le temps, d’élire résidence dans une pièce au
lieu de juste résonner dans celle-ci, alors nous pourrions à coup sûr situer le travail des artistes. Certains
albums seraient synonymes de leur lieu de naissance. Certains seraient imprégnés de la banlieue de célèbres
villes. D’autres d’îles inexplorées… Cet album de Cougar entre dans cette dernière catégorie et vient d’un pays
étrange mais magnique.
Conçu à Madison, Wisconsin, USA, les arrangements instrumentaux de Cougar tombent quelque part entre Four Tet, Fugazi et Nick Drake. Le son cependant singulier du groupe prend ses racines dans une vive sensibilité pour les textures et les formes, plus en ligne avec la musique à base de samples ou expérimentale qu’avec l’indie rock qui prend parfois des airs de rock academy. La musique de Cougar a de vrais eets sur les corps – qui sautent, se jettent en l’air, se roulent par terre – là où de trop nombreux groupes ne cherchent que l’ironie d’une posture. Sur ce second album, “Patriot”, Cougar va beaucoup plus loin dans l’agressivité, dans l’évocation aussi ; tout est beaucoup plus extrême que sur le premier, “Law”. Dès l’ouverture en nuance de “Stay Famous”, puis sur les projections extra-larges de “Florida Logic”, les beats electro-organiques de “Rhinelander” et le plus aéré “Pelourinho”, le groupe pose ses bases. Cela se poursuit avec l’assaut hard-rock polyrythmique de “Thundersnow”, le “Heavy Into Je” tout en fuzz, la construction mélodique de “Endings”, la mélancolie estivale de “Appomattox” et l’envolée Hammondesque de “Daunte v. Armada” jusqu’au sublime nal de “Absaroka”.
Cet album se tient de bout en bout, en une unique pièce quasi indivisible, malgré la variété des styles et des formes abordés. La tournée qui a accompagné la sortie de leur premier album, “Law” donc (mixé par John McEntire de Tortoise), les a propulsés dans de nombreuses listes/palmarès US en 2007. Les dates aux States et ailleurs les ont également connectés avec U.N.K.L.E., Maximo Park, et Art Brut entre autres. D’ailleurs Paul Smith de Maximo Park (pour qui « Law » est le meilleur album de 2007) admire « ce mélange unique de mélodies instrumentales sublimes et de rythmes à réaction, à la fois organiques et électroniques ».